L'avant et après de Julio María Sanguinetti

La loi uruguayenne interdit au président de la République en exercice de présenter sa candidature pour l'élection suivante. Rien ne l'empêche évidemment de recommencer un tour plus tard. C'est sans aucun doute ce à quoi se prépare Julio María Sanguinetti, pour 2005. L'avant et après ne signifie donc pas que l'ex président s'est reconverti dans la publicité pour lotion de rasage. Bien au contraire, il continue de se fourvoyer dans la politique.

Qu'est-ce donc que cet avant et après? Rien d'autre qu'un rappel des déclarations de Julio María Sanguinetti avant l'apparition de la petite-fille de Juan Gelman et aussi de ces déclarations après l'apparition de la petite-fille.

Une fois n'est pas coutume. C'est par l'après que nous commencerons.

APRES

M. Sanguinetti a donc déclaré, quelques heures après la diffusion de la nouvelle:

«Nous sommes très heureux que M. Gelman annonce qu'il a retrouvé sa petite-fille. Tous, et dans ce tous, j'inclus tous les Uruguayens, nous désirons que dans le milieu familial, chacun d'entre eux puisse trouver le chemin le plus paisible pour leur esprit.
Depuis que M. Gelman a fait sa dénonciation, nous avons fait tout ce qui était possible pour l'aider dans sa recherche. Nous avons dit que, même si nous avions des différences sur la façon dont avait été assurée la diffusion de l'affaire, nous continuerions de l'aider. S'il a eu maintenant du succès dans sa recherche, rien ne nous rend plus heureux quand une situation personnelle pénible est enfin terminée et qu'un pas de plus est donné pour dépasser les conséquences de ces années de violence.»

AVANT

Une semaine auparavant, M. Sanguinetti affirmait que ce qui était entre ses mains était «d'enquêter pour voir s'il était possible de savoir quelque chose. Après 24 ans d'un épisode qui a lieu en Argentine, aucune preuve n'a malheureusement été trouvée».

Il avait donc participé à une conférence de presse le jeudi 23 mars dans la ville de México. Il avait réitéré qu'aucune preuve n'avait été découverte sur l'endroit où pourrait se trouver le petit-fils du poète et avait affirmé que la naissance n'avait pas eu lieu en Uruguay.

Quatre jours avant de remettre les pouvoirs présidentiels à son successeur Jorge Batlle (membre d'une tendance adverse, mais du même parti politique que lui), il avait qualifié Juan Gelman de «vieux lutteur anti-démocratique». Dans une interview radiophonique, il avait accusé le poète argentin d'une «exploitation très triste» du sujet et ajouté que «malheureusement le plaignant n'avait apporté aucun indice nouveau. Un mois avant de nous signaler ce fait, il affirmait de façon définitive que la disparition s'était produite en Argentine».

Sans vouloir contredire M. Sanguinetti, c'est sans doute durant le mois en question que M. Gelman avait découvert la «piste» uruguayenne...

Ajoutons tout de même que M. Sanguinetti avait déclaré dans la même interview qu'il ne remettrait jamais l'information recueuillie à M. Gelman parce qu'«il ne le mérite pas. C'est un grand lutteur contre la démocratie et je suis un lutteur de la démocratie. Sur le terrain institutionnel et humain, nous continuerons d'essayer de l'aider; sur le terrain personnel, nous n'avons rien à nous dire».