Après la publication de cinq romans et de quatre livres de nouvelles, personne n'hésite plus à considérer Leo Maslíah comme un narrateur. Il s'avère pourtant encore impossible d'inscrire la prose à multiples facettes du chanteur auteur uruguayen dans un courant littéraire déterminé. Les noms de Lewis Carroll, Edward Lear, Ionesco et Boris Vian, parmi les étrangers, et celui de Felizberto Hernández, parmi les latinoaméricains, sont mentionnés autant les uns que les autres, sans choisir finalement celui qui serait le principal responsable du style (des styles ?) désopilant et extravagant de Leo.
Dans ce nouveau recueil de nouvelles, on trouvera aussi bien l'hyperréalisme d'une mère qui corrige son fils de façon maniaque, et la théorie selon laquelle les morveuses mangent de la morve et non pas de la soupe. Un univers rencontré, non pas dans l'Aleph comme Borges, mais sur l'abat-jour d'une lampe vue par le myope Rodríguez (le récit qui donne son titre au livre, et une nouvelle écrite exclusivement avec des mots commençant par la lettre “E”. Le cas d'un homme aimant qui finit par tout ingurgiter (digne de l'inspecteur Cortázar), et des couples extravagants qui se détruisent à cause de divergeance au sujet de l'emplacement de l'intersection des rues Paraguay et Sandokan. Un monde si proche du cirque dont l'absurde n'est dépassé que par l'absurde du “réel”.
(©1993 Ediciones de la Flor — Buenos Aires)